Les inondations par débordement de nappe sont un problème récurrent sur la côte Ouest de la Normandie. La menace d'une augmentation de la fréquence et de l'étendue de ces inondations, en lien avec l'élévation du niveau marin et une possible augmentation des pluies hivernales, soulève de réels enjeux pour l'aménagement et la gestion future de ce territoire.
L'étude décrit, via des modèles analytiques et numériques, les différents processus contrôlant les phénomènes d'inondation par les nappes phréatiques sur un site de référence, Bréville-sur-Mer (Manche). Le site est choisi d'une part pour sa sensibilité aux inondations par débordement de nappe, d'autre part pour sa configuration géomorphologique, fréquemment rencontrée le long des côtes de la Manche. Ce site se compose d'un cordon dunaire, d'un marais maritime et d'une paléo-falaise.
Les modèles révèlent que les variations piézométriques du niveau de la nappe phréatique côtière dues à la marée ne se propagent pas au-delà de quelques centaines de mètres depuis la mer. Dans la configuration analysée, les effets de la marée sont absorbés par le cordon dunaire et n'influencent pas les variations piézométriques de l'espace arrière dunaire (nappes du marais maritime et de la partie basse de la paléo-falaise). En revanche, les modèles montrent qu'une augmentation du niveau marin moyen, induite par le changement climatique, pourrait générer une augmentation globale du niveau de la nappe côtière susceptible de se propager à plusieurs kilomètres à l'intérieur des terres. La présence de drains arrières-littoraux limite cette propagation et protège les territoires continentaux à l'amont hydrologique, à condition que ces drains ne soient pas mis en charge par une connexion maritime. Ces drains constituent en revanche des zones de vulnérabilité élevée, puisque sous la double influence de la mer et de la décharge des nappes.
En l'absence de drain arrière littoral, l'élévation du niveau de la nappe dans les cordons dunaires pourrait atteindre un fort pourcentage de celui du niveau marin.
La diffusivité du milieu souterrain apparaît comme le facteur de contrôle critique d'un territoire comme Bréville-sur-Mer. Elle contrôle la propagation des variations maritimes dans l'aquifère ainsi que la capacité de celui-ci à se vidanger après une période de recharge importante. Caractéristique mal connue, la diffusivité a été appréciée ici via une chronique piézométrique située à Gouville-sur-Mer, à quelques kilomètres du site d'étude.
Une meilleure détermination de cette diffusivité constituera un préalable indispensable à la réalisation de modèles calibrés prédictifs de l'aléa hydrogéologique. Ces modèles devront également prendre en compte des processus non étudiés ici comme les effets de pointe ou d'anse le long du littoral, l'influence de la connectivité des drains arrière-littoraux avec l'océan, ainsi que les phénomènes de salinisation.